Il y a des expériences de voyage qui vous laissent des frissons de joie dans le dos, comme une rencontre furtive au détour d’un sentier, ou un lever de soleil qui retourne le cœur. Et puis, il y a celles qui touchent à quelque chose de plus profond, de presque sacré. Assister à la ponte d’une tortue de mer au Costa Rica fait partie de ces instants suspendus. J’ai eu la chance de vivre ce moment entre sable noir, étoiles et une lente procession millénaire – et je te promets, ça vaut chaque grain de sommeil en moins.
Pourquoi le Costa Rica est une terre promise pour les tortues
Le Costa Rica, petit par sa taille, mais géant par sa biodiversité, borde les océans Pacifique et Atlantique. Ses plages, souvent vierges, sont parmi les plus importantes au monde pour la nidification de plusieurs espèces de tortues marines. Cinq sur les sept espèces de tortues marines existantes viennent y pondre leurs œufs, notamment :
- la tortue luth, la plus grande de toutes
- la tortue verte, pacifique et gracieuse
- la tortue imbriquée, aux écailles précieuses
- la tortue olivâtre, célèbre pour ses rassemblements massifs
- la tortue caouanne, plus rare mais bien présente
Tout cela est rendu possible grâce à des zones protégées et une vraie volonté de conservation – sans oublier l’incroyable accueil de la population locale. À travers bois, marécages et rivières, le pays célèbre la vie à chaque pas. Pour nous voyageurs, ce spectacle naturel est une leçon d’humilité, à vivre avec respect et émerveillement.
Quelle est la meilleure période pour assister à la ponte des tortues ?
La ponte varie selon les espèces et les côtes, alors un petit guide s’impose :
- Côte Caraïbe (Tortuguero) : Juin à octobre, avec un pic en août pour les tortues vertes. La luth arrive quant à elle entre mars et juin.
- Côte Pacifique (Ostional, Playa Grande) : De juillet à décembre pour les olivâtres, mais aussi pour les luths (dans certaines plages du sud).
À noter : les nuits de nouvelle lune attirent souvent plus de femelles sur le rivage. Elles profitent de l’obscurité pour mieux se dissimuler des prédateurs… et des curieux. Si tu prévois ton voyage autour de cette période, tu maximises tes chances de participer à ce spectacle intimiste.
Où voir les tortues : mes plages coups de cœur
Tortuguero – Côte Caraïbe
Rien que le nom est une promesse d’aventure. Tortuguero, c’est une petite bourgade accrochée entre jungle et mer, accessible uniquement en bateau ou petit avion. Pas de routes ici, juste des canaux qui serpentent à travers une nature luxuriante.
J’y suis arrivée un soir d’août, en barque, alors que le ciel crachotait des gouttes moites. Quelques heures plus tard, accompagnée d’un guide local passionné, je marchais pieds nus sur la plage, guidée par le bruit sourd des vagues. Là, dans l’obscurité à peine troublée par la lune, une tortue verte creusait son nid, inlassablement. Un spectacle silencieux et bouleversant. Les tortues pondent ici par milliers.
Infos pratiques : Les tours de nuit sont obligatoirement accompagnés par un guide accrédité. Interdiction d’utiliser des lampes torches classiques — la lumière rouge est la seule admise.
Playa Ostional – Péninsule de Nicoya
Si tu rêves d’assister à l’un des plus grands rassemblements de tortues au monde, Ostional est ton graal. Ici, la tortue olivâtre arrive… en armada. On appelle cette arrivée en masse « l’arribada ».
Imagine des milliers de tortues qui surgissent en quelques jours pour pondre ensemble sur la même plage. C’est un chaos fascinant — certaines tortues escaladent même les nids des autres, provoquant un joyeux désordre sablonneux. Les plus grosses arribadas ont lieu entre août et novembre, souvent quelques jours après la nouvelle lune.
Petit plus : Ostional est l’un des seuls endroits au monde où une petite partie des œufs peut être légalement récoltée par la communauté locale pour des raisons économiques. Un modèle de cohabitation entre tradition, survie et conservation.
Playa Grande – Parc National Marino Las Baulas
Playa Grande, nom parfaite pour une tortue luth. C’est ici que cette géante marine trouve refuge entre octobre et février. La tortue luth peut peser jusqu’à 700 kg et mesure régulièrement plus de 1,5 mètre… Autant dire que la voir sortir de l’océan, c’est comme assister à l’échouement d’un petit sous-marin préhistorique. Impressionnante et douce à la fois.
L’accès à la plage est strictement réglementé pendant la nuit, et pour de bonnes raisons : la tortue luth est une espèce en danger critique. Si tu crois que l’expérience perd de sa magie à cause de ces règles, détrompe-toi. Marcher en silence, dans une ambiance feutrée, rend le moment encore plus intense.
Conseils pratiques pour une expérience respectueuse… et inoubliable
Ce type d’observation est une chance rare, mais elle demande un vrai respect des lieux, des animaux, et des habitants. Voici quelques recommandations de voyageuse un brin émerveillée, mais toujours vigilante :
- Ne jamais utiliser de lumière blanche (les lampes rouges sont parfois fournies par les guides).
- Rester à bonne distance des tortues pour ne pas les stresser (au moins 10 mètres pendant la ponte).
- Ne pas toucher les œufs, ni les tortues (même les bébés ! Ils doivent rejoindre l’océan seuls).
- Éviter le flash pour les photos, ou mieux : vivre le moment sans écran.
- Choisir un guide ou une organisation certifiée (contacte le parc national ou le refuge local).
Ces gestes permettent aux générations futures de vivre le même émerveillement que nous aujourd’hui.
Et le budget dans tout ça ?
Le Costa Rica n’est pas toujours réputé comme une destination « budget friendly », mais avec quelques astuces, rester dans ton enveloppe possible :
- Privilégier les bus locaux (réseau efficace et économique).
- Choisir des hébergements chez l’habitant ou auberges éco-participatives.
- Opter pour les menus « casado » dans les sodas (restaurants locaux) : bons, copieux et pas chers.
- Réserver les tours avec des coopératives locales – bien moins coûteux que via des agences étrangères.
Un tour guidé pour observer la ponte coûte entre 20 et 40 dollars selon l’endroit. Inutile d’investir dans de coûteux extras ; ici, c’est la nature le vrai luxe.
Une aventure qui va te retourner le cœur
Voir une tortue pondre ses œufs, ou des dizaines de petites silhouettes minuscules entamer leur course chaotique vers l’océan, ça ne se raconte pas. Ça se vit, les pieds dans le sable humide, dans le frisson d’un silence habité. C’est un voyage au-delà du temps, une communion entre toi, ces êtres millénaires, et la mer en arrière-fond.
Et dis-toi bien une chose : dans un monde où tout va trop vite, ces instants lents et puissants sont une forme de résistance, presque un acte poétique. Tu reviendras changé. Peut-être un rien plus humble, sûrement plus émerveillé.
Alors, prêt(e) à suivre les empreintes silencieuses des tortues sur le sable costaricien ?